« RéSolution » en Malaisie : projet phare du « Lab 8.7 » de RHSF

« RéSolution » en Malaisie : projet phare du « Lab 8.7 » de RHSF

Publié le 25 Août 2023

Par GUY CLAVEL

Face à la complexité de la lutte contre le travail forcé et le travail des enfants, Ressources Humaines sans Frontières (RHSF) mène, dans son programme de recherche-action « Lab 8.7 », le projet « RéSolution ». Ce dernier est déployé depuis près de deux ans, notamment en Malaisie où une entreprise de quelque 600 salariés a accepté d’y participer.

Le programme de recherche-action « Lab 8.7 » : analyser, tester, partager 

Créé et piloté par RHSF en partenariat avec le ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères (MEAE), le « Lab. 8.7 »* présente l’exemple unique d’une approche partenariale indispensable entre pouvoirs publics, entreprises et société civile pour atteindre l’objectif d’un travail décent pour tous. 
Le laboratoire répond en effet à un constat de RHSF sur le terrain : dans la lutte contre le travail des enfants et le travail forcé, chacune des parties prenantes (entreprises, investisseurs, consommateurs, Etats…) détient une partie de la solution. Et l’impulsion doit être donnée par chacune au plus haut niveau de la hiérarchie, et surtout dans une démarche commune. 
 
En tant que programme de recherche-action, il fournit un cadre académique aux expérimentations de RHSF qui laisse le temps à tous de tester des solutions avant de les partager avec le plus grand nombre, et ce dans l’intérêt général.  

« RéSolution » : un projet phare du « Lab 8.7 »

Dans le cadre du « Lab 8.7 », RHSF a mis en place en 2022 avec le soutien de l’Agence française de Développement (AFD) un projet d’une durée de trois ans, « RéSolution ». Ce projet, destiné à tester sur le terrain des méthodes de prévention des risques de travail indécent, s’est déployé au Costa Rica (plantation de café) et en Malaisie (industrie).  

Dans une exploitation agricole et une usine pilotes, deux salariés de RHSF démêlent sur place, avec des organisations locales de la société civile à l’expertise reconnue, la complexité des sources du travail forcé. En même temps, ils testent des pratiques adaptées en fonction des conditions locales, de la politique sociale des gouvernements, des réseaux d’agences de recrutement… 

En Malaisie, une usine de quelque 600 salariés

« La première tranche de notre projet dans l’usine « P » est terminée, et des solutions ont commencé à porter leurs fruits« , se félicite Aziz Ahammout, chef de projet RHSF, qui mène l’expérimentation à Kuala Lumpur avec l’ONG locale Tenaganita, active depuis 40 ans pour le travail décent des travailleurs vulnérables dans le pays. 

L’entreprise « P » avait la volonté de mettre en place des conditions de recrutement et de travail en accord avec une politique sociale respectant les travailleurs. Elle a exprimé le souhait d’être « usine pilote » dans le projet « RéSolution ».

Faute de main-d’œuvre locale suffisante, sur ses quelque 600 salariés, « P » emploie un nombre exceptionnel de 450 migrants.

Pour prévenir des conditions de travail indécentes, voire du travail forcé, elle devait travailler en même temps sur le recrutement et sur la gestion responsable des Ressources humaines.

« Notre première tâche, détaille Aziz Ahammout, a été d’analyser les problématiques rencontrées par l’entreprise : chaîne de recrutement viciée, heures de travail excessives, absence de dialogue social établi, discrimination et harcèlement de la part des superviseurs... ». 

« Ensuite, en plein accord avec la direction, nous nous sommes attachés à identifier les tâches à risque, pour tenir compte de l’expérience et de l’âge de chaque ouvrier, nous avons examiné les process pour faire monter en compétence les travailleurs qui le souhaitent, commencé à mettre en place un dialogue social avec des représentants pour les différentes nationalités (problèmes de langue), donné des formations sur la culture du pays, le travail attendu, les droits des employés, les problèmes qu’ils peuvent rencontrer... » 

La direction elle-même s’est formée, avec le responsable de projet de RHSF, sur les piliers des Ressources Humaines : rémunération et compétences, santé et sécurité, dialogue social, recrutement… 

Le processus de recrutement : un élément clé 

Le recrutement a reçu une attention toute particulière. Aziz Ahammout s’est rendu dans les pays d’origine de cette main-d’œuvre (Népal, Indonésie…) pour y interroger des candidats à la migration jusque dans les campagnes, afin de déterminer les problèmes rencontrés tout au long de la chaîne de recrutement, entre le village et l’usine. Entre autres, le versement indu de frais divers incombant normalement à l’agence ou à l’entreprise, versement qui met les travailleurs dans une situation d’endettement propice à des situations de travail forcé. 

Des responsables de l’usine ont parfois accompagné RHSF sur place, dans le pays des candidats pour les écouter. « Cela a permis d’humaniser le recrutement : le candidat était désormais vu comme un être humain avant d’être un travailleur« , remarque le chef de projet de RHSF. 

A la fin de 2022, RHSF a pu assister à une première vague de recrutement réalisée par une agence basée à Yogyakarta (Indonésie), récemment sélectionnée par l’usine « P ». Chaque candidat était interrogé par des responsables de l’entreprise, une séance d’information leur a fourni des renseignements sur leur travail et les possibilités d’évolution offertes par l’usine… RHSF était présente et a pu rencontrer librement des candidats. 

« Les ouvriers embauchés à cette occasion se montrent plus confiants, s’ouvrent plus« , note Aziz Ahammout. Selon lui, « il y a un changement d’attitude visible » entre les nouveaux arrivants et les anciens. 

Amener les travailleurs à prendre en main leur avenir

La seconde tranche du projet « RéSolution » visera à améliorer le système de recrutement, le dialogue social… Mais également à amener les travailleurs à se prendre en main, à construire leur avenir.

Pour Aziz Ahammout, « il faudra organiser le travail, gérer les compétences en les formalisant et en les validant, former les travailleurs au travail en équipe, leur apprendre à ne pas être vulnérables, les faire réfléchir avec les managers aux problèmes de santé – sécurité, leur enseigner la gestion…« 

En fait, dit-il, « il faut leur donner des outils pour se prendre en main. En effet, ces travailleurs migrants ont pour la plupart une vingtaine d’années. Ils sont dans l’entreprise temporairement. Après, ils rentreront dans leur pays. Il faut leur faire comprendre qu’ils pourront ensuite utiliser les outils tirés de leur travail dans leur propre environnement, dans leur pays d’origine« .

Pour en savoir plus sur le projet « RéSolution » en Malaisie, vous pouvez contacter le chef de projet Aziz Ahammout à aziz.ahammout@rhsansfrontieres.onmicrosoft.com


*Le « Lab 8.7 » a été lancé par RHSF en 2020, après l’institution par l’ONU du partenariat mondial « Alliance 8.7 ». Lui-même nommé ainsi en référence à la cible 8.7 des Objectifs de Développement Durable (ODD) de l’ONU, avec pour but d’éradiquer d’ici à 2025 le travail des enfants, et d’ici 2030 le travail forcé.