Une entreprise chinoise face à la crise du Covid-19 : « le projet de RH responsables porté par RHSF a joué un rôle positif »
Publié le 30 Mai 2020
RHSF a interrogé Darren Li, le directeur général de Polyunion, usine chinoise de plus de 1000 salariés, sur sa gestion des travailleurs face à la crise du coronavirus. En 2015, l’accompagnement de cette entreprise par RHSF, récompensé par deux prix internationaux, avait prouvé qu’il est possible d’améliorer à la fois les conditions de travail et la performance économique. Cinq ans après, le système mis en place permet aujourd’hui à Polyunion de mieux gérer la crise du coronavirus.
Quelle est la situation actuelle de Polyunion au niveau de sa production ?
Notre entreprise a repris progressivement le travail à partir du 17 février. Le 20 avril, l’entreprise avait repris le travail dans son intégralité.
Notre carnet de commandes a diminué de plus de 50% ces derniers mois, et nous prévoyons une réduction globale de 30 à 40% en 2020. Des clients importants ont fermé, ce qui a entraîné une pénurie de commandes.
Des ouvriers de votre usine ont-ils été atteints par le coronavirus ?
Non, personne n’a été touché.
Quelles sont les exigences du gouvernement chinois vis-à-vis des entreprises en matière de santé et de sécurité ? Comment contrôle-t-il le respect de ces exigences ?
Les exigences du gouvernement sont encore relativement faciles à atteindre. L’entreprise doit fournir à ses salariés des équipements de prévention (masques, désinfectants) et désinfecter régulièrement l’usine. Elle doit également mesurer et enregistrer quotidiennement la température des salariés. Les déplacements professionnels sont contrôlés par une application numérique. Les ouvriers doivent également faire un test d’acide nucléique à l’hôpital lors de leur retour à Shenzhen…
L’inspection chargée de la sécurité au travail effectue des visites régulières pour confirmer que l’entreprise a mis en œuvre les mesures appropriées (vérification du port des masques etc). Elle distribue également des repas aux salariés pendant leurs 14 jours de confinement.
Le gouvernement local apporte-t-il une aide quelconque à l’entreprise ?
Le gouvernement accorde certaines aides et subventions :
- Réduction du taux de cotisation pour la sécurité sociale,
- Exonération de la facture d’électricité et d’eau de l’entreprise pour le mois de février,
- Incitation des propriétaires à réduire les loyers des entreprises (au moins 15 jours),
- Subvention de 50 % pour l’excédent au salaire minimum.
Polyunion a droit à ces subventions.
Le projet de RH responsables mis en place avec RHSF dans votre usine a-t-il eu un effet positif face à l’épidémie ?
Oui, il a joué un rôle positif.
Nous avons ainsi appris à discuter avec les représentants des employés, ce qui nous a permis d’échanger sur les conditions de travail et les mesures de prévention pendant l’épidémie, et nous avons également beaucoup communiqué avec nos ouvriers. Pendant l’épidémie, les mesures de prévention et de contrôle ont été comprises et soutenues par nos salariés, et il n’y a pas eu de conflits [NDLR : des grèves ont eu lieu dans d’autres usines de la même région].
D’autre part, grâce au système de formation d’ouvriers polyvalents mis en place avec RHSF, une partie des travailleurs polyvalents sont capables de changer de poste en cas de pénurie de personnel sur certains postes. Cela permet une répartition plus souple du travail et cela évite des pertes d’emploi lorsque la charge de travail est réduite sur les postes d’origine de ces travailleurs.
Arrivez-vous toujours à limiter les heures supplémentaires excessives dans le contexte actuel ?
Entre février et mi-mars, les ouvriers ont fait des heures supplémentaires pour rattraper le temps perdu pendant l’épidémie et livrer les produits à temps. Mais aujourd’hui, les commandes ont tellement diminué que les départements de production travaillent 40 heures par semaine sans heures supplémentaires. Certains départements ont déjà commencé à donner les formations pendant le temps de travail.
Face à la réduction des commandes, notre entreprise ne procède pas à des licenciements : nous réduisons les heures supplémentaires ou utilisons les heures supplémentaires pour former nos salariés. Si la situation s’aggrave, nous aurons recours aux congés payés ou au chômage partiel. Mais je ne pense pas que nous licencierons de travailleurs.
Le système de rémunération mis en place dans le cadre du projet avec RHSF a-t-il joué un rôle positif pendant l’épidémie ?
Oui. Nous avons déployé ce système de rémunération dans l’ensemble de l’usine, et il a joué un rôle positif.
Nos salariés ont compris notre action et n’ont eu aucun problème concernant la paie.
Par exemple, en raison de l’épidémie, le département de production ne réalise pas d’heures supplémentaires, mais les ouvriers reçoivent toujours des primes de compétences et de production. Cela réduit l’impact de la diminution des heures supplémentaires sur leurs salaires et permet aux ouvriers de toucher plus que le salaire minimum qui est versé dans beaucoup d’usines. En outre, les primes de compétences encouragent nos salariés à acquérir de nouvelles compétences. Ils peuvent être promus, ce qui entraîne des primes plus élevées. C’est plus facile de motiver nos travailleurs à se former.
Dans le même temps, notre entreprise a donné à chaque salarié une aide de 500 yuans. Les ouvriers de l’usine voisine, n’ayant plus d’heures supplémentaires, ont demandé à leur employeur de faire de même. Face au refus de cette entreprise, les ouvriers voisins ont fait grève.
Interview réalisée par Hui Chen, présidente de RHSF Consulting, fin mai 2020.